Il était une fois au Japon : Le "Shoot-Style"

  • Par h-edge
  • Le 23/05/2015
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« Parce que nous ne nous frappons pas entre nous, nous frappons les idiots qui pensent que le catch est truqué, comme un spectacle de singe dressé. Une fois qu'ils ont vu notre combat ils n'avaient plus rien à dire. Ils ont regardé notre combat comme des imbéciles, avec la bouche grande ouverte à cause de la surprise. Notre combat n'est pas violent pour notre adversaire, mais pour ces idiots qui se moque de la BattlArts. Nous dirigeons notre colère au travers de nos combats contre ceux qui se moque de nous. »

Tel est la desormais célèbre réponse de Yuki Ishikawa, fondateur de la BattlArts, à la question : Pourquoi ses matchs contre Daisuke Ikeda sont ils aussi brutaux. Cette réponse est devenue célèbre parce qu'elle reflète parfaitement l'esprit du "Shoot-Style", un style ou le réalisme prime sur tout le reste au prix de matchs bien plus brutaux et parfois même plus violent. Le "Shoot-Style" a marqué les japonais dans les années 1980, au travers de cinq hommes, tous devenus des véritables légendes au Japon, instigateur non seulement d'un nouveau style catch mais aussi d'une nouvelle discipline, le Mixed Martial Art.

Les origines du "Shoot-Style"

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il faut définir ce qu'est le "Shoot-Style", c'est un style de catch assez spécial puisque dès sa création le "Shoot-Style" était présenté comme réel et s'opposait donc au produit fournit au fédération plus classique comme la New Japan Pro Wrestling ou la All Japan Pro Wrestling, à une époque ou les fans commençait à savoir que le catch n'était pas un sport de combat légitime, comme peut l'être la boxe par exemple.

La particularité la plus connu du "Shoot-Style" est que les coups ne sont pas retenu, les coups et soumission porté sont légitime afin d'augmenter l'effet de réalisme recherché, de plus les matchs sont différents de ce que l'on voit ailleurs, plus proche des sports de combats. Bien souvent les catcheurs sont des anciens artiste martial et se servent de leur connaissance dans leur discipline pour le match, plutôt que de se servir de leur connaissance dans le catch lui même. Mais le "Shoot-Style" reste du catch car les matchs sont tout de même scénarisé et le vainqueur du combat est prédéterminé. Il ne faut cependant pas confondre le "Shoot-Style" décrit ci dessus et un "shoot" ou les catcheurs se battent réellement sans respecté le script établis, un exemple qui a fait beaucoup parler de lui récemment est le "shoot" entre Yoshiko et Act Yasukawa à la Stardom.

Le "Shoot-Style" a deux inspirations majeurs, la première et la plus importante est le "Strong-Style" créer par Antonio Inoki dans sa New Japan Pro Wrestling au début des années 1970, au sens strict, le "Strong-Style" désigne un catch ou les coups sont portés en touchant réellement l'adversaire, mais pas toujours a pleine puissance, ce qui le différencie déjà du "Shoot-Style", de plus dans le "Strong-Style" certaines prises sont portés sans l'aide du catcheur qui reçois la prise (par exemple, la "German Suplex" de Neville sur Kevin Owens à NXT). Le "Shoot-Style" est également inspiré d'une autre manière par Antonio Inoki, en 1976, Antonio Inoki organise ce qui peut être considéré comme le premier combat de MMA de l'histoire en affrontant le boxeur américain Muhammad Ali, à la New Japan Pro Wrestling.

La seconde inspiration majeur du "Shoot-Style" est le "Lancashire Wrestling", un ancêtre du catch britannique issu de la région de Lancashire, connu pour être l'une des formes de lutte des plus violentes. Le "Lancashire Wrestling" est amené au Japon par des élèves d'un des plus grands praticiens de ce style, Billy Riley. Les élèves de Billy Riley ont incorporé ce que Billy Riley leur a appris dans le catch pour devenir populaire, surtout au Japon ou ce style de catch fascine rapidement les fans, il s'agit de Billy Robinson et surtout de Karl Gotch, ayant appris cet art au Snake Pit, une école de catch fondé par Billy Riley dans les années 1950. Karl Gotch qui rejoint dès sa création la New Japan Pro Wrestling en 1972 entraîne les jeunes catcheurs et transmet par conséquent sont savoir sur le "Lancashire Wrestling" a certains de ses élèves, qui créeront le "Shoot-Style" une dizaine d'années plus tard.

Karl Gotch avait également inspiré Antonio Inoki dans les années 1960 qui avait façonné son style de catch à l'image de Karl Gotch, lui même surnommé "Kamisama" au Japon (un terme signifiant Dieu, dans le sens monothéiste). Alors que Antonio Inoki est cité par les créateurs du "Shoot-Style" comme leur idole de jeunesse et le catcheur leur ayant donné envie de devenir eux même des catcheurs.

La Universal Wrestling Federation

En 1983, Antonio Inoki alors président de la New Japan Pro Wrestling, se retrouve endetté à cause de l'echec d'une entreprise situé au Brésil, lui appartenant. Pour se sortir de cette mauvaise passe, Antonio Inoki se sert de l'argent gagné avec la New Japan Pro Wrestling pour payé ses dettes, au profit de ses catcheurs, ce stratagème ne plaît pas à tout le monde et certains catcheurs vont quitter la NJPW pour créer leur propre fédération, la Universal Wrestling Federation (ou UWF).

Au début la UWF a un style de catch ressemblant aux autres fédérations de catch du Japon, mais rapidement et grâce à l'influence d'anciens artiste martial, à savoir Akira Maeda un ancien lutteur, son protégé Nobuhiko Takada, Satoru Sayama (plus connu sous son masque de Tiger Mask) un ancien Kickboxer, son protégé Kazuo Yamazaki et Yoshiaki Fujiwara un ancien pratiquant de Muay Thai, la UWF prend une nouvelle directive et le réalisme du produit est mis au premier plan. Au cours de combat, certes scénarisé, des catcheurs ayant des background différents s'affrontent à une époque ou le MMA n'existait pas encore.

Avec cette nouvelle recette alors inédite, la UWF rencontre rapidement le succès. Mais rapidement des tensions dans les coulisses surviennent entre les deux stars de la UWF, Akira Maeda et Satoru Sayama (qui se faisait alors appelé Super Tiger, puisqu'il n'avait pas les droits sur la "gimmick" de Tiger Mask, obtenu dès son départ par la All Japan Pro Wrestling, l'autre fédération dominant le catch japonais à cette époque). Akira Maeda voulait que la UWF se concentre sur les soumissions et ressmble plus à de la lutte amateur, alors que Satoru Sayama voulait que la UWF se concentre sur des coups de pieds et ressemble plus à du Kickboxing. Les tensions entre les deux se termine en Septembre 1985, quand un match entre les deux est organisé, et se termine quand Akira Maeda met un coup de genoux dans les partie génital de Satoru Sayama et perd par disqualification. Après ce match, Akira Maeda est renvoyé, et Satoru Sayama met fin à sa carrière de catcheur (il reviendra dans le catch plus de dix ans plus tard).

Avec la perte de ses stars principales la UWF est forcé de fermer ses portes et en 1986, le "roster" (sauf Satoru Sayama) retourne à la NJPW une rivalité d'invasion de l'UWF à la NJPW est mis en place, qui sera plus tard reprise par la World Championship Wrestling, avec sa nWo. Mais en 1987, la NJPW rencontre à nouveau des problèmes financiers à la suite d'une émeute au Ryogoku Kokugikan à cause d'un mauvais "booking" de la NJPW, après cette émeute la NJPW voit ses émissions télévisé être diffusé plus tard et recevoir moins d'attention qu'avant, rapportant donc moins d'argent. De plus en 1988, Akira Maeda est suspendu pour avoir frappé légitimement un autre catcheur de la NJPW, Riki Choshu (un "shoot"), Akira Maeda ne reçoit plus sa paie avec la suspension. Il décide de quitter la NJPW pour recréer la UWF, sous le nom de Newborn UWF.

Akira Maeda est suivit de la majorité de l'ancien "roster" de la UWF, dont Yoshiaki Fujiwara qui ramène les deux disciples du dojo de la NJPW dont il s'occupait, Minoru Suzuki et Masakatsu Funaki. Mais aussi d'autre catcheur dont Tatsuo Nakano ou Kiyoshi Tamura, tout deux était eux aussi des "rookie". Mais dès l'année 1990, la Newborn UWF rencontre des problèmes financiers, mais également des problèmes interne. La Newborn UWF ferme ses portes dès la fin de l'année, mais donne naissance à trois fédérations créer par d'ancien membre du "roster", la Figthing Network RINGS de Akira Maeda, la Pro Wrestling Fujiwara Gumi de Yoshiaki Fujiwara ou se dirige notamment Minoru Suzuki et Masakatsu Funaki, et la UWF International ou se retrouve la majorité du "roster" dirigé par Nobuhiko Takada.

Malgré sa courte existence, la UWF aura marqué le catch japonais et inspirera les différents "booker" pour créer une toute nouvelle ère du catch, par exemple à la fin des années 1980, Giant Baba, président et "booker" de la All Japan Pro Wrestling, décide de s'inspirer de la UWF et met fin au fin de match ambiguë, et au "Time Limit Draw" pour laisser place à des fins de match avec un gagnant et un perdant bien claire, pour créer ce qui est désormais connu comme la King's Road porté par Mitsuharu Misawa, Kenta Kobashi ou Toshiaki Kawada, avec de nombreux matchs devenu cultes et souvent cité parmi les meilleurs de l'histoire. Mais la UWF marquera aussi une nouvelle façon de penser pour les catcheurs, avec la réussite de la UWF, dirigé par des catcheurs et qui proposait un produit différents des autres fédérations de catch, à une époque ou il n'existait que deux fédérations de catch au Japon (la AJPW et la NJPW), beaucoup de catcheurs se diront qu'en proposant un produit propre à leur fédération ils peuvent réussir, par exemple la Frontier Martial-Arts Wrestling qui popularisera le catch "Hardcore" dès la fin des années 1980. La UWF est un précurseur de l'âge d'or de la "Puroresu" dans les années 1990, ou chaque fédération propose un produit différent avec ses propres stars, sa propre façon de fonctionner, et tout en mettant leur originalité en avant comme l'avait fait la UWF.

La transition au MMA

Les trois fédérations issu de la UWF, suivent désormais un chemin opposé, étant resté dans le "Shoot-Style", certaines évolueront pour essayer de continuer à captiver la foule, c'est le cas de la Fighting Network RINGS de Akira Maeda qui dès 1995 et ce jusqu'à sa fermeture en 2002 devient une fédération de MMA, a cette époque le MMA venait tout juste d'émerger et était de plus en plus populaires, il est inspiré directement du "Shoot-Style" proposé par la UWF.

De son coté la Pro Wrestling Fujiwara Gumi se détourne de plus en plus du "Shoot-Style" et du produit "in ring" en organisant par exemple des "cross show" avec d'autre fédération de catch, cette nouvelle orientation déplaît à Minoru Suzuki et Masakatsu Funaki, qui quitte la Pro Wrestling Fujiwara Gumi pour fonder leur propre fédération, la Pancrase. La différence entre la Pancrase et le "Shoot-Style" produit par la UWF par exemple, est que cette fois ci les résultat ne sont pas prédéterminé, faisant de la Pancrase la première fédération de MMA. La Pro Wrestling Fujiwara Gumi ferme ses portes en 1995, avec le départ de tout son "roster".

La UWF International est celle qui connaîtra le plus de succès. Elle créer son propre dojo, avec comme entraîneur Billy Robinson, le UWFi Snake Pit (qui existe encore aujourd'hui, avec des cours donné par Makoto Oe et sa femme Momoe Oe, plus connu sous son nom de jeune fille Momoe Nakanishi, l'une des dernières stars de la AJW) et son propre titre, détenu par Nobuhiko Takada. La fédération réussit à attirer des stars comme Vader ou Lou Thesz qui sert de "commissioner" pour le titre créer, Nobuhiko Takada se met également à clamer que la UWFi est la seule fédération de catch à avoir de la légitimité et dit que les autres fédérations sont truqué, en réalité la UWFi était une fédération de catch tout à fait normal, sauf qu'elle utilisait le même "Shoot-Style" que la UWF par exemple.

Dès 1993, avec le départ de certains des grands noms de la UWFi, tel que Vader, la UWFi se retrouve sans véritable challenger pour le titre détenu par Nobuhiko Takada. Pour éviter de mettre la clé sous la porte, la UWFi organise une rivalité avec la NJPW, alors la plus grande fédération du Japon. Or le "booker" de la NJPW a cette époque et celui qui se retrouve à la tête du "booking" de la rivalité n'est autre que Riki Choshu, qui avait été mis K.O par Akira Maeda près de dix ans plus tôt, qui est l'entraîneur de Nobuhiko Takada et l'un des créateur du "Shoot-Style". Pendant près d'un an les catcheurs de la UWFi perdent tout leur match contre les catcheurs de la NJPW, et la UWFi perd peu à peu sa crédibilité, à l'inverse la NJPW montre que ses catcheurs, sont les catcheurs les plus légitime du Japon (ce qui amènera Antonio Inoki à prendre une très mauvaise décision au début des années 2000). Seul Nobuhiko Takada n'est pas présenté comme un perdant, il remporte même le titre majeur de la NJPW, le IWGP Heavyweight Championship. Mais la crédibilité, est justement ce qui a fait le succès du "Shoot-Style", privé de ça, la UWFi est forçé de fermer ses portes en 1996. De ses cendres jailliera la Kingdom, qui ne rencontrera jamais le succès et fermera peu de temps après, après le départ de Nobuhiko Takada, la seule star de la Kingdom qui décide de se concentrer sur la toute nouvelle PRIDE une fédération de MMA, qui deviendra la plus grande du Japon.

On pourrait penser que le "Shoot-Style" est finis, mais après la fermeture de la Pro Wrestling Fujiwara Gumi, Yuki Ishikawa un ancien de cette fédération, décide de fonder la BattlArts suivit de tout le "roster" de la Pro Wrestling Fujiwara Gumi, à l'exception de Yoshiaki Fujiwara. Durant ses beaux jours, la BattlArts propose de nombreux "cross show" avec d'autres fédérations de catch, comme la Michinoku Pro Wrestling ou la Big Japan Pro Wrestling. Elle permet aussi à la ARSION, une fédération de catch féminin de créer un tout nouveau style de catch, mélangeant "High Flying" et "Shoot-Style", au travers des apprentie de Mariko Yoshida. Mais le concept du "Shoot-Style" est essoufflé depuis la catastrophe de la rivalité entre la NJPW et la UWFi, de plus l'avènement du MMA à finit le travail. Après avoir réussi à maintenir la BattlArts en vie jusqu'en 2011, devant des salles de plus en plus petites et en proposant de moins en moins de show par ans, Yuki Ishikawa annonce la fermeture de la dernière fédération de "Shoot-Style".

Aujourd'hui il n'existe plus de fédération de "Shoot-Style" comme ce fut le cas pour la BattlArts ou la UWFi par exemple, mais il arrive que des fédérations de catch propose un match de ce style de temps en temps comme si il s'agissait d'une stipulation, c'est le cas par exemple de la Real Japan Pro Wrestling de Satoru Sayama. Le "Shoot-Style" peut bel et bien être considéré comme mort. Il aura malgré tout marqué le monde de son empreinte, permettant la création du MMA dès les années 1990, les premières stars du MMA sont d'ailleurs des anciens catcheurs de "Shoot-Style" comme Masakatsu Funaki, Minoru Suzuki ou Nobuhiko Takada. Mais il aura aussi inspiré des catcheurs à utilisé un style de catch proche du "Shoot-Style" comme par exemple Katsuyori Shibata un catcheur de la NJPW, l'excellente Mariko Yoshida ou le légendaire Toshiaki Kawada qui a radicalement changé son style de catch  dans les années 1980 pour un style plus proche de ce qui pouvait être vu alors à la UWF, alors qu'aucun des trois n'a jamais pratiqué le "Shoot-Style" à proprement parler. 

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